Page du plan détaillé


Navigation par niveau


Navigation par tag


Navigation par EDC


navigation par suivi édito



rechercher un contenu


SECTEUR COURANT DU MANUEL > TEDI - Transformations des États démocratiques industrialisés > Jérôme VALLUY    

  • Partie - Expansion des objectifs et moyens de l’État
  • Chapitre - Politiques économiques et sociales - EDC n°2

    L’ambition de ce chapitre n’est pas de se substituer à un cours d’économie politique qui présenterait d’abord les concepts et les mécanismes économiques fondamentaux (agents et opérations économiques, comportements économiques, fonction des marchés, problèmes de l’économie nationale, etc.) pour analyser ensuite les mécanismes et les raisonnements qui fondent les politiques macro-économiques, c’est-à-dire les interventions de l’État destinées à corriger les déséquilibres susceptibles d’affecter l’économie nationale. On peut aborder l’économie politique dans une perspective à la fois plus restreinte et néanmoins intéressante d’un autre point de vue : il s’agira essentiellement de répondre à la question « Pourquoi l’État intervient-t-il ? ». On prolongera ainsi les interrogations ouvertes dans les chapitres précédents sur la genèse de l’État-providence mais en adoptant d’autres démarches de réflexion pour répondre à cette question : l’étude des idées d’économie politique (libéralisme, keynésianisme, école de la régulation...) et l’analyse sociologique des conditions de fixation des objectifs de politique économique.

  • Section - Les politiques économiques : quels objectifs ?

    La question principale soulève en effet deux questions connexes :

    1. L’État doit-il ou non intervenir pour corriger les déséquilibres de l’économie nationale ? Cette question amène à étudier les différentes positions en présence et en confrontation au sujet du rôle de l’État dans la société (là encore la dissociation politiques économiques/politiques sociales est indéfendable) (Cf. Sous-section - Deux paradigmes économiques opposés sur le rôle de l’État).
    2. Quels sont les objectifs qui guident les responsables politiques ? Cette seconde question conduit à identifier les principaux objectifs de politiques économique mais aussi à prendre en considération l’importance des contraintes politiques dans la conduite des politiques économiques (Cf. Sous-section - L’élaboration des objectifs de politique économique).
  • Sous-section - Deux paradigmes économiques opposés sur le rôle de l’État

    Le rôle joué par l’État dans la société, et notamment dans l’activité économique, dépend à la fois des trajectoires historiques qu’il a suivies dans différents domaines d’intervention mais aussi des conceptions politiques dominantes relatives au rôle de l’État. De ce point de vue, la pensée économique joue un rôle majeur dans l’histoire de l’État. L’histoire des idées économiques distingue classiquement deux grands paradigmes : le paradigme libéral et le paradigme interventionniste. Ces deux paradigmes s’affrontent depuis des siècles à travers des écoles de pensée qui les réaffirment successivement avec des arguments parfois renouvelés. Ces paradigmes ne sont pas « seulement économiques » mais ont des implications politiques générales sur les relations entre l’État et la société civile. Pendant longtemps, ils ont eu des répercussions au plan politique dans le clivage gauche/droite : une certaine droite était plutôt libérale et la gauche plutôt interventionniste malgré les chassés-croisés souvent observés à ce sujet.

Segment - Le paradigme libéral

A. En cours de rédaction
II. En cours d’éditorialisation


SOMMAIRE

Pour ceux qui n’ont jamais eu d’initiation à l’économie, rappel des grands repères : courants libéraux (1), principaux arguments (2), vision de l’État (3).

1- Principales sources de la pensée libérale

Du point de vue de l’histoire des idées économiques, la théorie classique se forme sur trois siècles en quatre moments/courants intellectuels spécifiques :

1.1- Les classiques

Première période (XVIIIe et XIX siècles) = celle des « classiques » (notamment Adam Smith, Jean-Baptiste Say, David Ricardo, John-Stuart Mill) qui ont développé une vision libérale de l’économie soulignant les aspects positifs du libre jeu du marché. Toute entrave à la concurrence, interne ou internationale étant dévalorisée, cette pensée est défavorable à toute intervention de l’État.

1.2- Les néoclassiques

Ce courant (Léon Walras, Vilfredo Pareto, Joseph Schumpeter, Charles Pigou, Maurice Allais...) se développe de la fin du XIXe siècle à nos jours. Les néoclassiques réunissent pour la première fois les différentes thèses économiques existantes en une science cohérente qui postule la régulation des comportements individuels par le marché. Ils ont tenté de démontrer mathématiquement les vertus prêtées aux mécanismes de marché par les classiques.

1.3- Les monétaristes

Les monétaristes (Milton Friedman, Friedrich Hayek) forment un courant qui se développe depuis les années 1950 jusqu’à aujourd’hui. Il s’agit de néo-classiques qui accordent un rôle déterminant à la monnaie dans leur analyse de l’économie. Ils se sont attachés à montrer les effets pervers des politiques d’inspiration keynésienne et notamment les politiques budgétaires.

1.4- Les nouveaux classiques

Ils (Robert Lucas, Neil Wallace) apparaissent dans les décennies 1970 et 1980 et aboutissent à une même hostilité à l’égard des politiques économiques mais en adoptant une démarche différente de celle des monétaristes, fondée sur l’analyse des comportements individuels : les agents économiques connaissent les effets économiques des décisions publiques et anticipent sur ces effets pour réduire leurs contraintes et se faisant réduisent l’efficacité de toute politique économique.

Ces différents courants ont en commun au moins deux idées fondamentales et sa conséquence :

  1. les marchés sont efficients ;
  2. les déséquilibres économiques sont temporaires.

Ces deux convictions déterminent leur hostilité à l’égard des politiques économiques et de l’interventionnisme étatique qui est tenu pour inefficace, voire pervers dans ses effets.

2- Principales composantes du paradigme libéral

2.1- Les marchés sont des mécanismes efficients

Les théoriciens libéraux soutiennent que les marchés garantissent toujours le meilleur équilibre économique possible car l’offre et la demande dans un marché libre interagissent continuellement et arrivent à s’équilibrer par la fixation d’un prix acceptable pour tous. Donc, selon les libéraux toute divergence entre l’offre et la demande est résorbée automatiquement par la libre négociation entre l’offreur et le demandeur.
Exemple : Le travail est réglé par l’ajustement des salaires, le produits de consommation par l’ajustement des prix, les besoins de financement de l’économie par l’ajustement des taux d’intérêts (besoins d’argent = baisse des taux, et vice versa).

C’est ce mécanisme d’ajustement automatique au sein du marché qui a conduit Adam Smith à parler de la « main invisible » qui oriente les actions fragmentées des individus vers la satisfaction de la collectivité dans son ensemble. Chacun agit dans son coin en tant qu’être économique rationnel et l’ensemble de ces comportements débouchent sur la satisfaction de la société toute entière. Si l’État intervient en imposant ses politiques économiques, ceci, disent les libéraux, nuit aux libres négociations et déséquilibre l’économie.

2.2- Les déséquilibres économiques sont temporaires

Les déséquilibres économiques peuvent apparaître suite à l’apparition d’une série de problèmes : la non-obtention du plein emploi, l’inflation ou les déséquilibres extérieurs. Toutes ces formes de déséquilibre économiques sont considérées par les libéraux comme momentanées et rapidement résorbées par le libre jeu du marché.

  • Le plein emploi est assuré. Les libéraux considèrent que dans des conditions de flexibilité des salaires, l’offre et la demande de l’emploi s’équilibrent. Chômage : Le chômage existe parce qu’il existe des réglementations qui empêchent le libre échange. Le développement du pouvoir syndical et de l’interventionnisme étatique avec la mise en place des politiques économiques déséquilibrent l’offre et la demande
  • L’inflation est un phénomène monétaire aisément maîtrisable. L’inflation signifie soit une augmentation de la quantité de monnaie en circulation, soit une élévation de la vitesse de circulation de la monnaie (beaucoup plus d’échanges). Pour éviter cette situation, disent les libéraux, il suffit que le gouvernement ou la banque centrale veille à ce que la masse de monnaie ne se développe pas plus vite que la quantité de biens et de services offerts par le marché -> banque indépendante du pouvoir politique (USA, RFA, Union Européenne...).
  • L’équilibre extérieur est automatique. Un déficit de la balance commerciale (les produits nationaux se vendent peu) se traduit par un déséquilibre de la balance des paiements et une variation du taux de change en défaveur de la monnaie nationale qui se traduit à son tour par une diminution relative des prix nationaux les rendant alors plus attractifs sur les marchés internationaux.

3- Les libéraux et le rôle de l’État

Les libéraux ne sont pas contre l’État. Ils sont contre le rôle dirigiste de l’État dans l’économie et ils proposent à sa place un rôle de garant. Qu’est-ce que l’État doit garantir ? En fait, la question des inégalités sociales n’est pas perçue par les libéraux comme une injustice mais plutôt comme une ressource. C’est le fait que chaque acteur a la possibilité de rompre avec le statu quo et d’innover qui pousse à la croissance économique. Les inégalités entre les situations sociales et économiques des acteurs jouent plutôt un rôle de stimulateur qui pousse les individus à progresser. En ce sens, tout projet de l’État ayant pour ambition de réduire les inégalités risque de casser le principal ressort de la croissance économique et d’ouvrir la voie à l’interventionnisme. Quel peut-être donc concrètement son rôle ? La réponse est donnée par Friedrich Hayek, l’un des auteurs phare de l’approche libérale :

La justice sociale renvoie à la nécessité de maintenir l’État dans une position minimale consistant à faire respecter des règles identiques par tous.

Bref, le rôle de garant qu’attribuent les libéraux à l’État consiste à garantir à la fois le libre-échange et les règles afférentes. Mais il s’agit d’une expression doctrinale dont on a vu, dans la partie précédente, qu’elle correspond plus à une expression universitaire que gouvernementale. Les milieux gouvernementaux, articulés aux milieux d’affaires, sont généralement plus pragmatiquement favorables aux interventions de l’État dès lors que les entreprises y trouvent leur intérêt par socialisation d’une partie des coûts de production.

Jérôme VALLUY‚ « Segment - Le paradigme libéral  »‚ in Transformations des États démocratiques industrialisés - TEDI  - Version au 3 mai 2023‚  identifiant de la publication au format Web : 128